lundi 5 juillet 2010

La grande gueule


Sur quelque sujet, en quelque domaine que ce soit, il sait tout, connaît tout, a tout vu, tout fait, connaît tout le monde. Il a une opinion qui n’autorise pas la contestation, un avis tranché, péremptoire, définitif, irrévocable, il n’y a pas à revenir dessus, c’est comme ça et pas autrement. Quoi que l’on dise, quoi que l’on fasse on a tort et lui raison au moyen «d’arguments» tous plus invraisemblables les uns que les autres, aussi invérifiables qu’incontrôlables, à prendre tels qu’il les assène et à ne pas contester. 

C’est du rentre dedans et de l’esbroufe dont il use pour prouver par a+b que 2 et 2 font 5 par la vertu de «démonstrations» abracadabrantes et auxquelles il n’y a pas à répondre puisqu’aussi bien il a réponse à tout, tout, tout. Si l’on n’est pas en mesure de prouver sur le champs que le soleil ne tourne pas autour de la terre, démonstration est faite qu’il a bien raison de soutenir cette folie puisqu’on est incapable de démontrer sa supposée erreur.

Si votre opinion à l’heur de concorder avec la sienne, vous êtes admis, il vous est loisible d’abonder en son sens. Mais à l’inverse, s’il y a la plus légère divergence avec ses a priori il s’emporte sans mesure et se charge de vous remettre sur la voie de la vérité, vous qui vous êtes égarés, vous qui n’avez pas sa culture ou ses informations de première main… 

Osez-vous cependant faire mine d’émettre l’ombre d’une défense de votre point de vue, il redouble de ferveur excommuniante et vous assène de la façon la plus indiscutable – et aussi la plus insultante – que vous n’y connaissez rien et que lui, par contre, est bien placé pour savoir puisqu’il a fait ci ou ça, connaît telle ou telle personne, qui ou que, peut citer à l’infini n’importe quel pseudo exemple à l’appui de ses élucubrations. 

Toujours la même vieille méthode: il affirme n’importe quoi, n’importe quelle insanité à laquelle il n’y a rien à répondre tellement c’est inepte, irréfutable de bêtise. Il amène l’autre à ne rien pouvoir répondre et, de ce silence, il conclut à l’acquiescement de son élucubration. Et croit, sincèrement sans doute, que l’autre doit être lui-même convaincu que lui dit vrai puisqu’on l’abandonne à ses divagations.

Les autres ne sont pour lui que des instruments au service de sa quête de reconnaissance qu’il pare des habituels beaux motifs humanistes, altruistes, mais c’est cousu de fils blanc. Le moteur premier de son être c’est le ressentiment, l’aigreur, l’envie, la jalousie, l’amertume, la rancœur, la vindicte.

On peut disserter à l’infini sur le pourquoi du comment, toujours est-il que la réalité présente c’est la lutte du médiocre sans vergogne qui ne tend qu’à la réparation avec un cynisme, un réalisme grossier purement et simplement dégueulasse, prêt à tout sacrifier pour l’aboutissement de ses revendications.


De lui-même, rien, rien, rien, il est en attente de la parole de l’autre pour y répondre. Tout son système est étayé, solidifié, calcifié. Dans son besoin pathologique de reconnaissance, il en est réduit à solliciter artificiellement le discours de l’autre pour s’offrir la jouissance de le contredire en permanence et que ne subsiste que son discours, donc son être. A chaque fois que je «décroche », comprenant bien que toute discussion est vaine puisqu’il a pathologiquement besoin d’avoir raison, je lui laisse le champs libre pour satisfaire son besoin névrotique de valorisation de son ego… 

Mais il est illusoire de s’imaginer qu’un autre sujet permettra un «échange» plus équilibré: quel que soit le thème, on retombe d’emblée dans le même processus où il s’agit pour lui de ratatiner l’interlocuteur en aplatissant, déconsidérant son discours de telle sorte qu’il soit amené à se taire, à s’écraser pour qu’enfin ne subsiste plus et ne reste sur le champs de bataille que son discours, son ego qui aura contraint celui de l’autre à la déroute (croit-il, le pauvre crétin).

C’est un refus frontal, massif du discours de l’autre. Pas de précaution, pas de gants: «Tu as tort, j’ai raison et je le prouve». A chaque rencontre on aboutit, bien contre son gré, en 2 réponses et 3 répliques, c’est-à-dire en moins de 10 secondes, en un combat imbécile avec un imbécile où il s’agit de savoir qui aura le dernier mot ce qui – pour lui – revient à avoir raison. Tel un roquet qui ne lâcherait pas le pantalon du passant, fût-ce l’assemblée générale des prix Nobel ou Dieu lui-même, il ne démordra pas de ses affirmations les plus douteuses, les plus insanes et les plus invérifiables. 

Et quand il arrive qu’il lui soit prouvé de manière absolument irréfutable, incontestable, qu’il s’est planté et qu’il a bel et bien pratiqué la politique de la grande gueule qui vise à faire taire les autres, il admet tout uniment qu’«ah! bon, d’accord, je croyais que…» mais il n’y a pas de quoi se fâcher, oubliant dans l’instant la surexcitation dans lequel il se trouvait la seconde précédente quand il soutenait n’importe quelle élucubration, oubliant l’identité et la responsabilité de celui qui n’a de cesse de mettre en œuvre une stratégie de la tension.

Une autre figure du pov' type...

27 commentaires:

merbel a dit…

Oui, c'est bien vu! Il y a aussi un autre "caractère" rencontré pas plus tard que samedi soir...et qui d'une certaine façon, l'excitation en moins, est tout aussi imbuvable.

Pressée que son mari fasse notre connaissance, une amie nous a invités à dîner... En guise d'amuse-gueule, son mari nous fait visiter son jardin, lance entre deux mots de botanique avec lesquels il croit nous épater que "Dieu merci! le jardinier a arraché le dernier rosier qui subsistait dans son jardin". Il a horreur des roses! Nous sommes polis, nous nous taisons: nous dirons plus tard, dans la soirée, que mon grand-père était jardinier et que, ma foi, les roses il savait les tailler ayant fait son apprentissage avec Georges Truffaut. Il ne relève pas, beau seigneur (saigneur?).
Au moment de griller des magrets, il me demande à propos des plaques de muselets de champagne, comment s'appelle le collectionneur de ces muselets. Ben, j'en sais rien et je m'en soucie guère, marchand de pommes de terre. Je dis avce mon plus beau sourire que ça ne peut se terminer que par "mane". Il me répond que non, ce doit être par "phile". le Monsieur est sérieux. Nous nous lançons un coup d'oeil: on repassera pour l'humour.
On aborde la littérature au cours de la conversation: nous découvrons, stupéfaits, que le type semble n'éprouver aucun plaisir à lire: il lit parce que "hein, la culture générale, c'est important, non?" Il me vise une fois de plus en me demandant le prénom de la fille d'Emma Bovary: tout à trac entre les rates de Noirmoutiers ou de l'Ile de Ré (j'm'en balance!)et les pommes caramélisées, j'hésite un peu: merde de merde, Blanche ou Berthe? Je donne la bonne réponse. Bingo! je vais pouvoir concourir pour la deuxième manche! Youpi! Mon compagnon en face de moi, commence à doucement se retirer de la conversation. Il est plus philosophe que moi...On parle musique, on évoque nos concerts à Bordeaux où nous sommes allés écouter des quatuors à cordes, il nous rétorque que "ce n'est pas facile de parler musique classique avec des collègues (?), dans son entreprise et que tiens, la semaine dernière il est allé voir Indochine et que là, les langues se sont déliées. Mon compagnon dit simplement "Oui, mais c'est de la musique de masse!"
Ca ne passe pas. Lui aussi, il aime Bach!
A sa fille, que j'aime beaucoup et qui s'est fendue en nous préparant de délicieuses profiteroles maison, il lui demande le silence alors qu'elle raconte la fabrication de son dessert et que nous nous extasions (toutes proportions gardées) devant le beau chocolat bien fluide: "Ecoute-moi, c'est sérieux, il faut que je t'explique la théorie des fluides selon Reynolds." On écoute religieusement le Monsieur, une fois de plus..."Bon, excusez-moi, j'vais m'coucher", dit la fille.On la comprend! Ca pourrait être tellement plus intéressant si c'était expliqué par n'importe qui d'autre!!!Qui y croit!
Et puis -enfin!- il aborde le sujet de l'école et de ses maux (et quand je pense qu'on nous accuse nous, les enseignants, de ne parler que boulot! J'avais rien demandé, moi!), de ses dérèglements , de ces mômes laissés pour compte et trouve l'explication infaillible: "Il faut de la volonté" C'est pourquoi, en 4ème, lui, il a demandé de partir dans un pensionnat militaire, pour apprendre la vie, nom de Dieu! Et c'est comme ça qu'il a décroché Centrale. La boucle est bouclée.

Ce "caractère-là", c'est le parvenu de l'esprit! Pour ne parler que de l'essentiel. Nous nous sommes sentis très très ... intelligents et cultivés en sortant de chez lui!

Excusez-moi, j'ai été très longue!

Flocon a dit…

Oui, je crois que tous nous avons dû croiser et supporter ce genre de personnage.

On s'y croirait! Cela correspond bien aux premières lignes du billet: le gars qui sait tout, a tout vu, connaît tout, a réponse à tout.

L'adulte qui traîne un vieux complexe d'infériorité et que sa réussite sociale (j'imagine) n'a pas
rassuré et qui encore et toujours a besoin de s'imposer aux dépends des autres pour croire assurer ses arrières.

Plus il persiste dans cette extériorisation de son angoisse et plus il la perpétue alors qu'il lui faudrait faire un travail intérieur.

Mais cela signifie aussi laisser de côté ses béquilles mentales et ça c'est trop dangereux: comment fera-t-il sans béquilles, sans l'échafaudage de ses mécanismes de défense qui chez lui sont inversés et sont tout d'agression et de despotisme vis à vis de ceux qui l'entourent?

Je pense à la fille du bonhomme...

"A sa fille il lui demande le silence"

Elle a dû bien en baver alors (et sa mère aussi mais on peut supposer qu'elle était consentante lorsqu'elle s'est mise avec lui).

On peut craindre pour la qualité des relations de la fille avec les hommes. Et sur ce qui s'ensuivra pour les enfants qu'elle aura (1). De génération en génération la même malédiction nous suit.

"Est-ce ainsi que les hommes vivent et leur destins les suivent" n'est-ce pas?

"Qui y croit!"

Cela ne manque jamais de m'épater ce genre de caractère qui manifestement est à ce point oublieux des autres et absents à leur présence à eux qu'ils ne perçoivent pas même intuitivement qu'ils ne sont pas crédibles une seconde. Ils sont trop dans le besoin de reconnaissance.

Je suis d'un naturel trop bienveillant et suis porté a priori à ressentir une certaine compassion pour ces gens mais la vie m'a aussi appris à la longue que plus on se laisse aller à cette tendance plus on alimente le besoin oppressif de celui qui veut manipuler les autres.

Me permettez-vous une citation?

" Souvent l'oppresseur étend ses mesures aussi loin que va la crainte de l'opprimé"

Balzac
(l'enfant maudit)

Il y en a d'autres de la même farine mais j'en garde sous le pied...

"Nous nous sommes sentis très très ... intelligents et cultivés en sortant de chez lui!"

me fait immédiatement revenir à l'esprit une phrase de Stendhal (Lucien Leuwen).

"Plusieurs heures après les avoir quittés on se sent encore bête d'avoir côtoyé ces gens-là"

Malheureusement c'est de mémoire, je n'avais pas encore pris l'habitude de noter les passages qui me parlaient à l'époque (il y a une petite vingtaine d'années) où (2)j'ai lu Lucien Leuwen.



"Excusez-moi, j'ai été très longue!"

Mais c'est un plaisir de tous les instants et je vous demande de l'être plus encore. Vous ne ferez jamais qu'approcher ma propre prolixité... Qui plus est, c'est bien la raison d'être d'un blog qui s'intitule Shall We Talk...



(1) L'usage de l'auxiliaire Avoir dans l'expression avoir des enfants me gêne.

(2) la conjonction (?, pas le courage d'aller vérifier) qui est une conjonction de lieu me gêne aussi. L'anglais est plus resourceful puisque il se dit The day when I was etc. et non The day where I was.

Flocon a dit…

"Est-ce ainsi que les hommes vivent, et leur destins au loin les suivent".

merbel a dit…

Pour vous éclairer...
Où (que vous avez dû apprendre dans la chanson des pronoms relatifs "qui, que quoi dont, où" (pour les formes simples) est en fait un adverbe relatif (du latin ubi). Il ne peut s'appliquer qu'à des choses et sert à marquer le lieu, le temps (ce qui vous tracasse), la situation
"La ville où vous habitez", "le temps où nous sommes".

Hist."Où" était, dans l'ancienne langue, d'un emploi beaucoup plus étendu qu'aujourd'hui et se mettait dans les phrases où, parlant de choses,on emploie aujourd'hui les formes du pronom relatif composé auquel, duquel, dans lequel, etc. Ex: " C'est une chose où je suis déterminée" (Molière, Le Médecin malgré lui, III,6)

"Où" pouvait autrefois avoir pour antécédent un nom de personne; cet emploi est tombé en désuétude au XVIIème siècle. Cependant on le trouve parfois chez les auteurs classiques: "Ce commissaire où il nous renvoyait" (Mme de Sévigné, lettre du 13 juin 1684).

Il y a aussi, sur l'emploi des pronoms relatifs, des "subtilités" comme par exemple celle entre "d'où" et "dont" avec les verbes "sortir", "descendre", etc.

J'ai eu le COURAGE (pfff! pas comme vous!) d'aller consulter mon juge de paix chéri! Un Belge qui a écrit "Le Bon usage" (un ouvrage de référence sur la grammaire française)! Il s'agit de Maurice Grévisse. A installer dans votre biblio, vous qui semblez intéressé par les langues.

Anonyme a dit…

Ooof... ma pôv tête. Je viens de finir un jeu d'échecs et puis ce matin et maintenant de lire ton billet et les réponses. Both enjoyable, but they tax my poor brain.

However, to sooth the mind, there is the music. Comme avez dit Merbel l'autre jour, tu nous gâtes avec la musique. C'est gentille d'avoir mis Hendrix pour l'écoute au'jourdhui. Merci.

Pour ce qu'il y a de genre de personnes dont vouz parlez, tous les deux, ils finnisent de n'avoir plus d'amis. Ils ont toujours raison mais ils sont tout seules dans leur cértitude. Je connais un type comme ça et il ne comprends pas pourquoi il n'a plus des amis. Et pourtant il est tout à fait intelligent, mais il a trop besoin pour avoir raison et lorsque il commence à parler c'est fini. Il a une voix forte et basse et dominant.

Je connais des blogs où il y a ce genre de type et eventuellement il n'y a presque plus personne qui a envie de offre son opinion car elles savent que lui, il a toujours le dernier mot, il a toujours raison, et donc c'est inutile et pas de le peine d'essayer avoir une dialogue avec tel type.

Anonyme a dit…

d'offre..

pas de la peine...

I have no doubt made many other mistakes..

Blogger a mangé mon premier réponse. J'aurais du d'abord l'avoir copier. Ouais, je le sais... excuses, excuses...

Flocon a dit…

Live with Anijo!

Woah c'est la première fois que je lis un commentaire en français aussi long Anijo. Kudos, je ne savais pas jusqu'à quel point tu pouvais aussi bien écrire en français.

Now, I'm impressed here!!!

Et je vois combien il est plus facile pour nous Frenchies d'écrire à peu près correctement en anglais que pour les anglophones de parler français.

There are so many traps and pitfalls in French with our conjugations, accords des sujets et des adjectifs, féminin et masculin...

Je relis ton commentaire et je ne trouve pas une seule erreur de syntaxe.

You certainly master 95% of our language.

Les petites erreurs sont relatives aux genres essentiellement. Avec un dictionnaire at hand ton texte serait parfait.

C'est aussi ce que je fais quand j'ai un doute pour le spelling de certains verbes. Des fois il y a doublement de la syllabe finale (to refer/ referred) et des fois pas (to mention/mentioned).

Le plus souvent je suis trop proche du français (personnellement with 2 n whereas personally with one n.

Vraiment très très bien Anijo.

Je me souviens que tu faisais des parties d'échec par correspondance et d'un billet il y a 2 ans et demi sur lequel tu avais laissé un commentaire.

Tu as parfaitement bien compris le contexte de La grande gueule et l'échange avec Merbel.

Ton commentaire me fait penser qu'il n'y a que les hommes je crois qui sont comme ça. Je n'ai jamais rencontré de femmes qui expriment ainsi ce besoin d'avoir toujours raison dans une "conversation". Elles l'expriment d'une autre façon still...

Je crois que c'est une question de reconnaissance par le père qui a manqué à ces hommes et ils courent toujours après toute leur vie.

Lack of love from their mother, lack of admission(?) recognition(?) from their father. And they have to build their lives nonetheless.

Mais c'est insupportable pour leur entourage past a certain level of disturbance.

Anonyme a dit…

Le plus souvent je suis trop proche du français (personnellement with 2 n whereas personally with one n.

Ah oui, de même .. 'finissent' et non pas 'finnisent' par exemple.

J'essayerai d'écrire en français plus souvent. Tu me donnes du courage avec tes félicitations. Merci.

Je parle mieux que j'écris. Je peux prononcer le 'r' et le 'u' au point que les français sont choqués. Des fois ils savent que chui pas français mais ils ne savent pas que chui ricain.

Et oui, la partie d'échecs c'était par correspondance. Parfois la partie c'est avec un français et donc j 'apprends des mots comme 'bourde' (blunder) qu'est pire q'une faute (mistake) ;)

Contente que tu dis que je fais des fautes et non pas des bourdes en essayant d'écrire en français.

Hommes vs femmes pour être grande gueule... j'n sais pas.. ça dépend.. Mais des hommes ils ont la voix la plus fort et la plus basse, c'est certaine.

Anonyme a dit…

la plus forte...

Pourquoi c'est 'le plus souvent' et non pas 'la plus souvent'.. Je croyais qu'on parlais des 'fois'

Flocon a dit…

"Pourquoi c'est 'le plus souvent' et non pas 'la plus souvent'.. Je croyais qu'on parlais des 'fois'"

Euhhh... ben je ne sais pas.

"Fois" est féminin effectivement quand on dit Une fois mais après il n'y a plus de genre.

J'ai regardé dans mon grand dictionnaire de français (one and a half page dedicated to fois) où il est écrit que le genre féminin du mot "fois" ne s'explique pas vraiment. C'est comme ça...

Je ne vois pas de rapport entre fois et Le plus souvent qui est une forme invariable.

Il doit y avoir une explication mais
comme tu sais l'histoire de l'évolution des langues aboutit souvent à des bizarreries.

Cela me rappelle un copain, il y a très longtemps, qui voulait améliorer son niveau d'anglais et lisait des livres de grammaire.

Je lui disait toujours que ce n'était pas la bonne méthode pour se perfectionner.

A mon sens il ne faut pas essayer de comprendre pourquoi une langue fonctionne comme elle fonctionne (il faut être linguiste alors) mais il faut écouter les gens et lire.

Je ne me suis jamais soucié de grammaire en anglais. Je lis la presse, j'apprends le vocabulaire et je prends les choses comme elles sont without further ado.

Her three year old daughter should write her three years old daughter logically speaking. And yet it doesn't, unless I'm mistaken.

C'est la même chose avec The U.S is and not are. C'est comme ça, je n'essaye pas de comprendre.

En la circonstance j'imagine que The U.S se comprend comme la Nation américaine ou l'État américain ce qui entraîne donc le singulier.


Ce sont les apprenants étrangers qui posent les questions les plus pertinentes...

merbel a dit…

Anjo,

Peut-être que cela vous aidera à comprendre la règle ...

" Souvent" comme "loin, près, longtemps, souvent, tôt, tard" est un adverbe qui supporte des degrés de signification: comparatif et superlatif d'infériorité, d'égalité ou de supériorité et toujours au masculin pour le superlatif de supériorité et d'infériorité.

Ex: loin, le plus loin, le moins loin

Votre rapprochement "des fois" et souvent", vous le faites sans doute parce que les deux mots ou expressions indiquent la fréquence.
En fait "des fois" est un mot de la langue familière ou populaire pour dire "parfois" ou "quelquefois"...

Notre langue employait aussi, il y a longtemps" "souventefois" , mais c'est aujourd'hui un pur archaîsme.

Bien à vous, Anjo! (espérant ne pas passez pour une "pov'type! avec ma cuistrerie...)

ZapPow a dit…

Bon, puisque "La Bruyère" est déjà pris, je te suggère d'adopter comme pseudo "La Fougère".

Pour les amoureux de la langue française, un blog incontournable, celui des correcteurs du Monde, Langue Sauce Piquante, où on fait d'ébouriffantes découvertes sur les mots, les expressions de notre langue…

À voir aussi, Le Petit Champignacien Illustré et Les carnets du vicomte entre autres.

Flocon a dit…

Merci Merbel de vos explications (moi j'ai rien comprendu...).

J'espère seulement revoir Anijo sur le blog... ;-)

Flocon a dit…

ZapPow,

Langue sauce piquante je connais mais pas les 2 autres liens auxquels tu renvoies.

Les Carnets du Vicomte me semblent assez pointus cela devrait intéresser Merbel.

Le Petit Champignacien marche bien semble-t-il d'autant qu'il est assez récent. Je viens de le parcourir, je vais le garder en marque-pages histoire de le lire plus attentivement.

Devrait intéresser merbel aussi. Il présente une foultitude de liens vers d'autres blogues consacrés à la langue, grammaire, style etc.


Un jour il faudra que je tente un billet sur l'intérêt que suscite l'étymologie chez certains (dont moi).

j'ai déjà quelque chose sur la généalogie. C'est assez long, je le mettrai en ligne un de ces jours.

Anonyme a dit…

Merci Merbel ! Votre cuistrerie était pratique pour moi. :)

Flocon a dit…

Ooops Anijo...

I'm sure merbel will have understood you meant well and wanted sincerely to thank her for her grammatical advice. The hitch is that you probably thought of "erudition" or something to that effect since "cuistrerie" is an absolute no-no when adressing someone.

Actually, it's next to insulting :-(

Again, merbel as a teacher is used to this sort of situation with her students and won't have been taken aback with this inappropriate word.

N'est-ce pas merbel que vous comprenez et pardonnez l'erreur de notre petite Américaine?

Anonyme a dit…

Ooops.. Merci Flocon. J'ai cru que cela veux dire "didactic" (designed or intended to teach)

merbel a dit…

Bien sûr que je pardonne à Anijo! Je voulais l'aider mais il est vrai que seule la pratique fait assimiler ce genre de problèmes...Toutefois, le recours à la grammaire n'est pas (toujours!) inutile.
Oui, je connais LSP, je m'en régale!
Flocon et ZapPow, il existe un dico formidable pour l'étymologie : c'est un dico en deux volumes , un Robert, sous la direction d'Alain Rey intitulé "Dictionnaire historique de la langue française".
Je connais LSP et c'est un régal!
Merci pour les deux autres liens que je ne connaissais pas! Les deux sont très intéressants!Mais j'aimerais tellement que la langue ne soit pas affaire de spécialistes mais aussi d'amateurs, d'amoureux de la langue... voire de toutes les langues car elles sont toutes formidables!

Anijo, la français est une des langues les plus difficiles au monde. La preuve? Jusqu'à l'âge de 14 ans les petits Français apprennent toujours les conjugaisons, les classes grammaticales, font des dictées et ce n'est pas pour cela qu'ils en sortent en maîtrisant parfaitement leur langue. En Allemagne, plus de dictée après 8 ans et pour le reste, la grammaire, la concordance, etc, tout va à peu près naturellement.
Mais en français quel galère. Pourquoi "pays" ne se prononce-t-il pas païs, pourquoi le "vers" ( de poésie) prend-il un "s"? Pourquoi "Chante" (2ème personne du singulier=tu) à limpératif ne prend pas de "s" alors que "tu chantes" (indicatif) en prend un?
Et bien parce que notre langue a un lourd passé historique et que le latin, puis le bas latin, puis les dialectes, puis les emprunts à l'anglais (Guillaume le Conquérant, puis à l'allemand, puis à l'arabe , et puis, et puis...ont emberlificoté notre langue! Voilà sans doute la raison pour laquelle notre langue disparaît...
Désolée de vous avoir ennuyé avec mon cours de grammaire, Flocon. Comme dirait l'autre: "Peut mieux faire!"

Flocon a dit…

"la français est une des langues les plus difficiles au monde"

Me permettez-vous d'être plus que réservé sur ce point?

J'aime ma langue comme chacun aime la sienne mais je ne suis pas de ceux qui vont jusqu'à dire que la langue française est la plus belle du monde.

Il faudrait tout de même comparer c'est à dire connaître les autres langues.

J'ai appris le suédois, c'est sympa mais effectivement ce n'est pas éblouissant de complexité.

Le finnois, le russe, l'arabe, le hongrois et toutes les langues européennes se distinguent-elles véritablement pas une moindre sophistication à quel que niveau que ce soit du français?

4 genres en Hongrois, 6 déclinaisons en russe usw.)

L'anglais possède un vocabulaire 2 fois plus étendu, si ce n'est plus, que le français.

La grammaire allemande vaut bien la grammaire française question complexité. L'orthographe ne fait quasi pas problème en revanche.

Bon il y aurait mille et une choses à dire.


"La preuve? Jusqu'à l'âge de 14 ans les petits Français apprennent toujours les conjugaisons, les classes grammaticales, font des dictées et ce n'est pas pour cela qu'ils en sortent en maîtrisant parfaitement leur langue."

On peut en dire autant du chinois où les adultes, même cultivés, sont très loin de posséder ne serait-ce que le cinquième des idéogrammes disponibles. Il y en a 40.000 je crois quand le pékin moyen n'en connaît que 2 ou 3.000.

"les emprunts à l'anglais (Guillaume le Conquérant)"

Ne serait-ce pas plutôt le contraire? L'anglais/américain est truffé de mots d'origine français (et latine aussi: fortitude, d'où la bravitude de Ségolène Royal) quand l'introduction de mots américains en français est très récente au fond (oui, boulingin et redingote se trouvent au XIXè siècle)

Les emprunts à l'allemand existent certes mais sont tout de même limités (vasistas oui et quelques autres)

La sonorité de bien des langues me semble autrement plus musicale que celle du français.

Vaste sujet, il faudrait ouvrir un blog genre LSP pour en discuter...

ZapPow a dit…

Que dire du portugais, qui emploie encore couramment le futur du subjonctif, quasiment disparu dans autres langues latines, et, pire, a un infinitif qui se conjugue (un concept des plus ardus à appréhender).

J'ai observé, quand j'étais au Brésil, une véritable vénération pour ceux qui avaient la maîtrise de la grammaire portugaise, une maîtrise pas toujours présente même au sein des élites les plus cultivées. J'ai vu avec curiosité le président Sarney devoir une partie de sa popularité, même dans les classes populaires, à sa diction et à la qualité de son portugais.

merbel a dit…

Je n'ai pas dit, Flocon, que c'était la plus belle langue du monde. Je pense que les exceptions truffent notre langue, et les langues à déclinaisons sont grosso modo plus faciles à manipuler du point de vue des règles... Je sais la richesse du vocabulaire anglais (je l'envie parfois car pour préciser la pensée il faut toujours avoir recours, en français, à une périphrase, alors qu'en anglais on peut "compresser" les adjectifs en les faisant se succéder avant le nom). En allemand, je ne dis pas que tout est rose, mais pas 36 façons d'orthographier ni de prononcer... Pour les Chinois, oui, seulement 10% des idéogrammes utilisés.

Chaque langue a sa complexité, j'en conviens... mais je trouve qu'au détour de chaque phrase, dans notre langue, un étranger peut se poser mille questions, qui sont parfois résolues dans sa langue alors que nous, on peine à lui donner l'explication, le comment du pourquoi...

Pour Guillaume, oui, il a imposé le "franco-normand", devenu ce que l'on a appelé "le français d'Angleterre", d'où les emprunts à ce qui n'était pas nécessairement du français, mais plutôt du normand ou du bas latin: toutefois, la guerre des barons au XIIIème (je crois) a fait naître un sentiment anti français, et c'est au XIVème que l'anglais s'est imposé.Je me suis mal exprimée en citant Guillaume entre parenthèses... c'est à partir de Guillaume que les langues se sont interpénétrées et l'anglais effectivement porte les traces indélébiles de cette période-là. Vous avez raison!

Pour vos erreurs, ne vous inquiétez pas! Ce n'est pas un crime! (ni un délit!) et quand on écrit beaucoup, on prend nécessairement des risques! Je suis pour une orthographe simplifiée , notamment l'orthographe lexicale. Mais je ne sais même pas si cela améliorerait les "performances" de nos élèves qui trop souvent n'ont plus "l'image" de leur langue maternelle. C'est cela qui est préoccupant et c'est leur dénuement linguistique qui m'inquiète beaucoup (cf les travaux d'Alain Bentolila): la sélection passe par l'écrit, plus que jamais. La citoyenneté aussi.

Enfin, pour conclure sur une note plus gaie, on progresse ou on régresse toute sa vie en orthographe: ce n'est pas la lecture qui répare cette maladie docteur, c'est la pratique de l'écriture: plus on écrit, moins on fait d'erreurs.

4096 signes, j'ai compris! Je m'arrête là. Rires!

PS La page s'ouvre impeccablement bien, désormais.

merbel a dit…

Mais j'ai encore dépassé, qué mierda!
Désolée, c'est peut-être moi qui fiche la pagaille?????

Anonyme a dit…

Merbel. Je vous en reconnaissante pour votre gentillesse et votre aide avec cette belle langue. Pour moi, oui, c'est la plus belle langue pour mes oreilles. Bon, mais c'est une question d'opinion.

Anonyme a dit…

Je vous en suis...

Mes doigts marchent plus vites que mon pôv crâne

Flocon a dit…

merbel,

"Je n'ai pas dit, Flocon, que c'était la plus belle langue du monde."

Je sais bien que vous ne l'avez pas écrit puisque je ne vous le fais pas dire... Il est vrai que la construction de la première phrase pouvait prêter à confusion.

A propos des relations étymologiques et généalogiques de l'anglais vis à vis des autres langues européennes: C'est en apprenant le suédois il y a 25 ans que j'ai su d'où venait le shall et le should.

Ska en suédois marque le futur comme skull est la marque du conditionnel.

Le shall que j'ai appris semble avoir disparu au profit du will. Il n'a pas fallu 50 ans.


"Je suis pour une orthographe simplifiée , notamment l'orthographe lexicale."

Vous êtes sur le terrain donc je me tiens coi mais je fais partie de la vieille école et tiens ferme à ce que j'ai appris (ou que l'on m'a appris).

Genre on ne touche à rien. Même une petite dose de complication serait la bienvenue.

En tout cas on ne touche pas à l'accent circonflexe!!!


Pour les 4096 signes, non d'évidence vous ne les avez pas dépassés puisque vote commentaire est là.

Mais cela m'arrive depuis quelques jours; dans un premier temps Blogger informe qu'il ne peut pas traiter le commentaire car celui-ci est trop long et dans la même foulée il le traite...

Flocon a dit…

ZapPow,

J'avais commencé un commentaire à l'intention de merbel en citant les langues que tu connais et puis je me suis dit que c'était un peu "indélicat" donc je me suis abstenu.

Mais comme je sais que les questions de langue t'intéressent je m'attendais à ce que tu nous fasses part de tes réflexions à ce sujet.

Concernant le très grand intérêt des Brésiliens pour la parfaite maîtrise du portugais, cela n'a-t-il rien à voir avec la fascination des colonisés pour les valeurs que les colonisateurs leur ont apportées?

Je me souviens de développements de cet ordre chez Albert Memmi (portraits du colonisé, du colonisateur).

Processus assez pervers car cette admiration/appropriation des valeurs importées peut aussi s'analyser comme une aliénation par rapport à son propre patrimoine culturel et donc à soi-même.

Flocon a dit…

Pour le ska marque du futur en suédois (norvégien et danois).

Merci peut se dire simplement Tack ou plus civilement Tack ska du ha: Merci tu auras.