samedi 3 novembre 2007

La pitié dangereuse (1)



Chaque jour nous en apprend davantage sur cette invraisemblable équipée de "l'Arche de Zoé". Ce qui paraissait être au départ une opération "humanitaire" bizarrement montée pourrait faire apparaître in fine une nouvelle affaire à multiples tiroirs. Non seulement le Gouvernement français est impliqué mais même les autorités espagnoles qui tombent des nues!!!

A la tête se trouve un individu qui n'est certainement pas illuminé comme il a été dit mais bel et bien manipulateur. Être parvenu à mystifier les autorités française et tchadiennes suppose autant de détermination que de capacité.

Mais ce qui m'intéresse c'est de comprendre pourquoi ce genre de rocambolesque tartarinade semble si typiquement français, hélas.

Rony Brauman dans un entretien au Temps a mis en cause, notamment, Bernard Kouchner, pour la responsabilité morale qui serait la sienne dans cette affaire.

Il m'apparaît de fait inéluctable qu'à force de dramatiser à outrance des situations qui le sont déjà bien suffisamment, B. Kouchner participe à la mise en place d'une atmosphère emprunte de culpabilité ("Il faut agir! Que faisons-nous? Qu'avez-vous fait?") qui ne manque pas à terme de créer une dynamique qui finit par se nourrir de sa propre énergie. Vient un moment où s'impose comme une évidence qu'il est du devoir de chacun d'agir parce que les ressorts de la culpabilité ont été actionnés.

La culpabilité étant un moteur essentiel de notre agir/réagir, on ne s'étonne pas qu'il se trouvera toujours des gens de bonne foi pour se faire entraîner dans d'irresponsables aventures parce qu'ils ont fini par croire qu'il était possible -et surtout légitime- de contourner les règles en vigueur au prétexte de l'inertie et de l'incapacité ou de l'indifférence des "responsables".

Ce genre de discours dont le fond est qu'il est possible de faire plus qu'il n'est fait, que les autorités n'entendent pas, ne voient pas, ce genre de discours finit par saper le fondement de l'autorité de l'Etat auquel les citoyens sont appelés à se substituer. Avec tous les dégâts qu'on peut imaginer.

C'est également le type de message dont B.Kouchner était le propagateur, voire l'initiateur, il y a 5 ans en parlant du devoir d'"ingérence humanitaire" en Iraq. Heureusement que le Gouvernement d'alors ne l'a pas écouté...

Les bonnes intentions n'ont pas leur place dans la marche des Etats. Le réel n'est pas plaisant et pas agréable à accepter souvent. Mais remettre en cause la marche de la Cité comporte encore plus de dangers potentiels qu'on ne croit en écarter.

Bernard Kouchner, à présent Ministre des Affaires Etrangères, se voit maintenant retourner les conséquences d'une posture morale à laquelle il s'est identifié depuis des années et qui, dans ses nouvelles fonctions officielles, le confronte à un réel plus complexe encore qu'il n'était.



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