mardi 10 juin 2008

Palingénésie



"You're either with us or against us."

On se souvient de cette tirade définitive du président américain il y a 6 ans. C'est une illustration imparable du mode de pensée binaire exposé ici.

A tort ou à raison, les Américains, en général, sont souvent moqués pour la "simplicité" de leur mode de pensée, ou, dit d'une autre façon, pour le manichéisme qui semble être leur grille de lecture préférentielle. A tort ou à raison une fois encore, la subtilité et la délicatesse dans l'expression ne sont pas les qualités qui viennent immédiatement à l'esprit concernant nos amis US.

Ce qui peut sembler paradoxal puisque s'il est un pays qui a développé une élite artistique, scientifique et intellectuelle à nulle autre pareille dans le monde contemporain, c'est bien les USA.

S'agit-il donc d'un préjugé, d'un cliché sans fondement ou peut-on trouver dans l'histoire du pays des explications à cette réputation?

Hmmm... qu'on le veuille ou non, ou plutôt qu'on l'admette ou pas, les premiers colons aux Amériques étaient des grenouilles de bénitier et des culs-terreux. Que les Américains qui liraient ce billet ne s'offusquent pas: ces colons étaient européens!

-1° Les premiers colons, ceux du Mayflower et ceux qui les ont suivis avaient une vision religieuse du monde. D'un côté le Bien, de l'autre le Mal. On ne fait pas plus simple et radical en matière de manichéisme. Est-il excessif d'avancer que la mentalité collective de l'Amérique a été marquée dès l'origine par ce mode de pensée qui fournit une réponse toute faite en matière morale à quelque situation qui puisse se rencontrer? Il reste même des résidus de cette immigration, les Amish.

-2° Par ailleurs, les immigrants européens du XIXème jusque dans les années 1920 étaient pour l'essentiel des paysans et des ouvriers. Pas exactement des classes sociales chez lesquelles on rencontre d'ordinaire une certaine sophistication, tant dans la pensée que dans son expression. Cela laisse des traces...

-3° Osons même une autre explication: Ces immigrant européens quittaient un continent où la luttes des classes était une réalité quotidienne. D'un côté l'opulente bourgeoisie et les classes moyennes, de l'autre les laissés pour compte, les damnés de la terre. Ceux d'en haut, ceux du château et des villes et ceux d'en bas, ceux de la terre et de la force des bras. Si l'on veut un exemple de clivage social en mode binaire, en voilà bien un.

Comment croire que cette répartition sociale inégalitaire n'ait pas imprégné les esprits et ne se soit pas propagée au fil des ans dans ce nouveau pays qu'investissaient ces colons?

-4° Enfin, les colons arrivaient en Amérique avec l'idée de rompre définitivement avec le vieux continent. En brûlant métaphoriquement leurs vaisseaux, c'est bien une rupture radicale que les immigrants entendaient mettre en œuvre. Une vie nouvelle s'offrait à eux. Que l'on comprenne bien la force de cette notion de vie nouvelle. Il y avait l'avant et maintenant l'après. Voilà encore un schéma binaire.

Si l'on prend en considération ces 4 origines possibles d'un mode de pensée binaire, il n'en est que plus remarquable que les États Unis soient parvenus au XXème siècle à faire jeu égal avec l'Europe entière en matière d'art et de culture. Ce qui était inimaginable au XIXème est devenu réalité après la seconde guerre mondiale.

Mais c'est d'une élite dont il est question à présent. D'un côté comme de l'autre de l'océan. Quant aux masses, elles sont partout les mêmes.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Je suis assez d'accord (donc ce n'est pas "juste une hypothèse" ;-)

J'ajouterais à propos du point n°4 : tous ceux-là qui débarquent et brûlent leurs vaisseaux se retrouvent non seulement avec une terre à conquérir mais aussi le dos à la mer, et la menace est mortelle de s'y voir repoussé par ceux qui peuplaient déjà le pays.

Bien sûr, il ne s'agit que d'un sentiment intime, car les indigènes n'étaient pas en position de force ; mais peut-être est-ce ce qui rend ces descendants de cul-terreux si proches des Israeliens...

Etchdi

Flocon a dit…

peut-être est-ce ce qui rend ces descendants de cul-terreux si proches des Israeliens...

Il y a ce que tu dis et peut-être (le peut-être est purement rhétorique) la dimension religieuse.

J'avais commis un billet en mars dernier sur le rapprochement que tu suggères.