vendredi 10 juin 2011

Subversion interdite

 
On pourrait croire que la rationalité est complètement absente en matière de drogue tant les arguments des politiques et des responsables de la lutte contre le trafic des stupéfiants sont fallacieux.

La seule comparaison avec l'alcool et le tabac invalide aussitôt l'argument de la santé publique qui serait cause de l'interdiction du cannabis en particulier.

Étant donné les sommes faramineuses qui sont en jeu, on peut s'étonner que les États, partout dans le monde, renoncent à ce marché.

Il est significatif que cette question des stupéfiants soit l'objet de multiples traités internationaux et que tous les États s'en préoccupent avec un zèle qu'ils ne mettent certainement pas à lutter contre la pauvreté ou les  inégalités sociales par exemple. Cette "guerre contre la drogue", menée essentiellement depuis la fin du XIXè siècle, entraîne toujours plus de coûts de la part des États qui mettent d'ailleurs leurs armées au service de cette cause perdue.

Que l'instrument ultime des États soit appelé à servir dans cette "guerre" indique bien quelle est la nature des enjeux. On pourrait croire que les États en font une affaire personnelle pour ainsi dire et que c'est leur raison d'être qui est mise en cause, voire mise en danger.

C'est bien le cas en effet et c'est là que l'on trouve la rationalité qui fait défaut dans les discours officiels. Il est en effet de la nature du Léviathan d'imposer sa puissance et sa légitimité aux individus qu'il réunit sous son autorité.

Les servants des États ne le savent probablement pas, mais ils poursuivent des politiques qui ont été inspirées par des considérations religieuses à l'origine, particulièrement les trois religions monothéistes qui interdisent à l'individu de transgresser les normes morales édictées par leurs grands prêtres.

Les drogues, l'alcool et le tabac -dans une moindre mesure- sont réprouvés par ces religions car ce sont autant d'instruments de libération des plaisirs et d'émancipation des individus par rapport aux interdits qui déterminent le Bien et le Mal. La soumission des individus à ces normes morales assure la maîtrise des grands prêtres sur les masses qui sont ainsi tenues sous contrôle.

Que cette guerre dont on nous rebat les oreilles soit menée à la drogue et pas à l'alcool ni au tabac est de nouveau parfaitement irrationnel, l'intérêt de tous les États serait de cesser cette pseudo guerre qui ne connaîtra pas de fin. Mais les États en l'espèce se comportent comme des Églises qui ne peuvent tolérer des dissidences sur le plan capital de la transgression des normes établies.

Les États ne sont pas des Églises pourtant mais les politiques sont intoxiqués par leur propre propagande au point d'agir contre les intérêts des Léviathan à la tête desquels ils se succèdent les uns les autres.

La drogue est in fine un vecteur de subversion politique majeure, raison pour laquelle elle est désignée dans le monde entier comme la menace intérieure, comparable à la menace extérieure ultime qu'est la guerre. Il n'est donc pas étonnant que la doxa officielle assimile l'une à l'autre.

6 commentaires:

Ned Ludd a dit…

Il y a deux choses differentes: l'état et l'église.

Pours les états, les lois contrent les "drogues" ont apparus après WW1.
En autres mots, environ l'époque de la prohibition aux EU.

Il n'y avait pas de problème sociétaux avec les drogues avant. C'est l'interdiction qui a créee le "problème".

Ned Ludd a dit…

L'église a des raisons multiples pour s'opposer à la drogue.

Saint Paul et Mohamet ont surement eux leurs "révelations" après avoir consommé certains produits hallucinogenes.

Qui sait combien d'autres pères de l'église ont fait pareil. Si cela a continué, l'église aurait éclaté.

La chasse aux sorcières peut au moins en parti être attribuer à la consommation inintentionelle de l'ergot, une parasite de l'orge.

En fait, la LSD est un dérivé de l'ergot.

Flocon a dit…

Je fais précisément le parallèle entre les États et les Églises car les deux sont des monolithes ayant les mêmes rigidités d'une masse par rapport à ses composants.

Dans les deux cas il y a des interdits qui tiennent du dogme et des tabous.

"les lois contrent les "drogues" ont apparus après WW1."

Cela a commencé en fait au XIXè et même avant according to Wiki.

C'est l'accroissement démographique et le développement des relations internationales qui ont donné au phénomène une dimension mondiale.

Je voulais aborder les guerres de l'opium en Chine et la prohibition mais cela nous menait trop loin.

"C'est l'interdiction qui a créee le "problème"."

Je suis bien d'accord.

Flocon a dit…

"Saint Paul et Mohamet ont surement eux leurs "révelations" après avoir consommé certains produits hallucinogenes."

La plupart des prophètes et autres chamans sont probablement entré dans la carrière de cette façon en effet. Cf la Pythie de Delphes.

"Si cela a continué, l'église aurait éclaté."

Exactement! C'est bien pourquoi les Églises ont condamné les drogues qui permettaient aux individus de s'émanciper de leur autorité ce qui les mettait potentiellement en danger d'explosion.

"La chasse aux sorcières peut au moins en parti être attribuer à la consommation inintentionelle de l'ergot, une parasite de l'orge."

Tu fais sans doute allusion aux sorcières de Salem?

Il y avait régulièrement des cas d'empoisonnement au seigle en Europe mais je n'ai plus les détails en tête. Peut-être était-ce dû à l'orge???

Il me semble que les malades avaient des hallucinations.

Ned Ludd a dit…

Non, j'ai pensé de la chasse aux sorcières en France, particuliarement du cas de Loudun--un film a été fait par Ken Russel.

Loudun

Flocon a dit…

J'avais complètement oublié l'affaire de Loudun. Merci de me donner l'occasion de faire une révision.