dimanche 30 mai 2010

Tragique carence


S’il y a une carence chez autrui qui ne manque jamais de m’épater, c’est la complète absence du sens pédagogique. L’incapacité dont font preuve nombre de personnes à expliquer clairement et simplement des choses claires et simples ne cesse de me laisser coi !

Les mathématiques couvrent un domaine auquel je suis malheureusement totalement et absolument imperméable. Arrivé aux fractions je cale… c’est dire. Mais je suis curieux; aussi ai-je un jour eu l’occasion de me demander ce que c’était donc que les logarithmes. Je me suis adressé à 3 étudiants en maths, sûr que nul ne pouvait mieux me renseigner.

- Le 1er m’a carrément dit qu’il ne savait pas l’expliquer. Bon, c’est clair, pas de faux-semblant.
- Le 2ème s’est lancé sans que je lui demande dans des « démonstrations » couvrant 2 pages A4 en quelques minutes pour admettre finalement qu’il ne voyait pas non plus comment répondre à ma question…
- Quant au 3ème, il m’a dit qu’il me manquait les bases qui lui permettraient de me dire ce que sont les logarithmes…

C’est un peu loin à présent mais je crois me souvenir qu’un logarithme est un exposant qui permet de «monter» un chiffre quelconque à une valeur donnée. C’est un raccourci en quelque sorte.

Autre exemple beaucoup plus récent: Il se vend des CD et DVD à enregistrer 32x, 48x ou 52x. Bon.
48x fois quoi?

La réponse me semble couler de source mais pour en être sûr j’ai demandé à deux vendeurs de chez Darty. Les malheureux! C’était pathétique de les voir bredouiller, inventer, tourner en rond pour finalement me dire que « ça va plus vite ». D’accord, mais plus vite que quoi?

Même question posée au responsable du magasin Apple près de chez moi. C’est à ne pas croire et pourtant le gars est parti dans une improvisation où les centaines de minutes se mélangeaient avec la vitesse de rotation du disque dur pour finir par me dire de lui-même « Je dis n’importe quoi, là ».

Réponse : La gravure s’effectue 48 fois plus vite que ne se fait la lecture.

Comment n’être pas capable d’énoncer quelque chose d’aussi simple me dépasse.

On oubliera les cours d’initiation à l’informatique à l’usage des grands débutants… c’est tragique.

Ça peut sembler anecdotique et distrayant mais ça ne l’est pas tant que ça je trouve quand on songe aux milliers d’heures gaspillées par des millions de gosses dans les écoles ou en famille, qui posent mille et une questions qui ne reçoivent pas de réponses, de mauvaises réponses ou carrément de pures et simples conneries âneries.

On me dira heureusement il y a l’Internet et Wikipedia à présent qui sont des sources inépuisables de savoir. C’est sûr que ça m’aurait changé la vie il y a 40 ans… Cela dit, regardez ce qu’il y est dit des logarithmes…. Ben, faut déjà savoir de quoi l’on parle parce que pour l’ignare que je suis…

Comme quoi la vie est un éternel recommencement…

6 commentaires:

ZapPow a dit…

L'explication la plus claire et la plus simple d'un logarithme, c'est :
Puissance à laquelle il faut élever une constante appelée base pour obtenir un nombre donné.

Si claire et simple que soit cette explication, elle laissera la plupart des profanes perplexe : à quoi peut bien servir un tel truc ?

L'explication ne suffit pas.

Condorcet disait :
L'ingénieuse invention des logarithmes, en abrégeant les opérations de l'arithmétique, facilite toutes les applications du calcul à des objets réels, et étend ainsi la sphère de toutes les sciences, dans lesquelles ces applications numériques, à la vérité particulière qu'on cherche à connaître, sont un des moyens de comparer, avec les faits, les résultats d'une hypothèse ou d'une théorie, et de parvenir, par cette comparaison, à la découverte des lois de la nature.
C'est bien joli tout ça, mais, à moins d'avoir le nez dedans, le concept même de logarithme reste nébuleux.

En ce qui concerne les maths, leur enseignement est coupé de sa base pratique, et trop axé sur l'abstraction. Bien des gens auraient parfaitement compris le théorème de Thales, par exemple, si on l'avait démontré en situation, et non en griffonnant sur un tableau : il est facile à retenir, mais son utilité pratique perd beaucoup de son évidence, sinon toute.

Flocon a dit…

T'es bon en maths aussi alors?

Cette question des logarithmes je l'ai posée il y a 15 ans. Quand j'ai eu le sentiment d'avoir compris, je m'étais dit au fond c'est tout simple.

L'explication que tu donnes est claire et simple mais il m'a fallu la lire 2 fois.

Quant à l'utilité des logarithmes j'en avais compris qu'elle simplifiait les calculs en permettant d'user de petites valeurs plutôt que de nombres à 10 chiffres et plus qui entraînaient dans des développements interminables.

Le texte de Condorcet comporte 10 virgules en une seule phrase! Il faut la lire à tête reposée...

L'enseignement des maths... Mes années de lycée furent un chemin de croix et d'humiliation sans fin. Le jour où j'ai obtenu le Bac je m'étais dit: plus jamais ça!

Cela dit je regrette bien d'être à ce point exclu de l'univers mathématique. J'imagine qu'il doit procurer des joies intellectuelles qui me sont et me resteront toujours interdites.

Je suis passé chez Wiki pour savoir ce que c'était que le théorème de Thalès...

Brève réminiscence des années 60 où je ne comprenais même pas ce dont on nous parlait.

On m'aurait exposé les fondements de la philosophie politique en japonais que ça ne m'aurait pas été plus incompréhensible...

Il y avait aussi cette histoire d'identités remarquables (pas sûr) dont je n'ai jamais compris en quoi elles étaient remarquables.

Blocage de chez blocage, et quand on se construit sur une impossibilité viscérale à absorber un savoir particulier, rien n'y fait, c'est devenu une partie substantielle de la personnalité.

Enfin, les logarithmes étaient l'occasion de se désoler du manque de pédagogie de ceux dont on attend le plus.

ZapPow a dit…

J'ai été prof de maths, et aussi de chimie, de sciences physiques, de technologie, de travaux manuels.

J'ai été prof de maths après avoir été nul en maths au lycée, jusqu'à un salutaire redoublement en seconde. Je suis alors devenu très bon en maths, et, en terminale, pour le fun, je faisais des maths avec les élèves des classes préparatoires aux grandes écoles. J'ai passé brillamment le bac, où j'ai eu 19/20 en maths, en révisant juste une demi-journée. J'ai abandonné l'enseignement il y a longtemps, et ai beaucoup oublié de mes connaissances mathématiques.

Les identités remarquables, ou égalités remarquables, sont remarquables en ce sens qu'elles permettent une grande simplification des calculs, quand on a remarqué, hé hé, qu'on est en présence d'une de ces fameuses identités, connues depuis l'époque babylonienne. Enseignant, j'en ai utilisé une, à l'occasion, et à la grande surprise de mes collègues, pour faire faire du calcul mental à des élèves de 6e, sans leur dire, d'ailleurs, ce que c'était. Les gamins étaient ravis de découvrir une nouvelle façon de faire des multiplications, et de trouver, de tête, en quelques secondes, le résultat de 17 x 23 ou 44 x 36.

Les plaisirs qu'auraient pu te procurer les maths, tu les retrouveras dans la philosophie, qui, dans l'Antiquité, marchait main dans la main avec les mathématiques.

Flocon a dit…

Coïncidence j'ai un billet sur les profs dans le tiroir...

Tu sais mieux que moi qu'il y a beaucoup de paramètres qui font qu'on adhère (ou pas) à une matière scolaire.

Va savoir... Mon aversion pour les maths est bien identifiée chez moi. La chimie m'a toujours laissé de marbre.

Pour ce qui concerne la physique, j'en savais plus à moi tout seul que toute la classe réunie: ça me passionnait. Problème, lors des examens il fallait que ce savoir se traduisît par le média mathématique et là c'était la cata.

Paradoxe donc: c'est moi qui en savais le plus et c'est moi qu'on retrouvait parmi les 3 derniers. Je rageais d'autant plus contre les maths!

Et pourtant j'avais bénéficié d'une aide spécifique (un copain qui avait eu le bac l'année précédente) pour les maths en vue du Bac. J'avais compris (pour ce que je m'en souviens) à "traiter" des fonctions et dérivées je crois. Tout en ne comprenant pas le moins du monde de quoi il retournait au fond.

Il y a tout de même un domaine particulier qui n'a jamais cessé de me fasciner, ce sont les nombres premiers.

Bien sûr je suis allé voir Wiki mais bon, il faut des prérequis que je n'ai et n'aurai jamais. C'est joué, c'est plié hélas.

Je fais partie de la génération bénie qui a essuyé les plâtres des mathématiques dites modernes (vers 1966?)

Peut-être était-il encore possible d'éviter le naufrage définitif auparavant mais sur ce coup-là j'ai sombré définitivement.

Un chemin de croix je te dis.
7 ans pendant lesquels le système amène des dizaines de milliers des gosses à s'autopersuader qu'ils sont des minables parce qu'ils n'accrochent pas aux maths, qu'ils n'y comprennent rien. Bonjour l'estime de soi au sortir de 7 ans de ce régime...

J'avais parcouru il y a quelque 30 ans des articles ou bouquins de Stella Baruk mais bon, oui j'étais bien d'accord avec elle, il ne restait plus qu'à convaincre l'E.N et de toute façon je n'étais plus concerné.

Pour ce qui est de la philo il n'a pas pu t'échapper que j'y porte un intérêt certain et qu'effectivement j'y trouve un grand plaisir.

Ce qui m'intéresse ces temps-ci ce sont les fondements des maths, dont j'ai longtemps cru que tout avait été découvert de ce qui devait l'être depuis le XIX siècle environ.

Curieux ces concepts nés de notre raison, concepts que nous devons découvrir et explorer toujours plus avant alors même qu'ils émanent de nous.

Comme s'ils avaient une autonomie qui leur permettaient de se développer dans une fuite au-devant de nos propres investigations.

Un mouvement hégélien en quelque sorte puisque chaque pas franchi amène à une nouvelle étape qui rend inutile (sauf à titre de passage obligé) les étapes qui ont précédé.

Les maths c'est comme la marche en fait. Il faut avancer un pied devant l'autre pour progresser et les pas effectués n'ont plus d'intérêt en eux-mêmes. Il n'ont été utiles que pour nous amener là où nous sommes à un moment donné.

Bon, parallélisme à prendre avec un peu de sel tout de même...

ZapPow a dit…

Le gros défaut de l'enseignement des mathématiques, selon moi, c'est qu'il est déconnecté de l'Histoire. C'est en partie ce que j'entendais lorsque dans mon premier commentaire, j'ai dit qu'il était coupé de sa base pratique. On veut enseigner le système vigésimal ? Alors, qu'on le présente comme un des aspects de la civilisation maya, qu'on s'amuse de sa découverte, qu'on joue avec ses symboles, qu'on essaie d'en faire ce que les Mayas en faisaient. La trigonométrie ? Elle serait plus facilement appréhendée si on la présentait dans son contexte historique : comment, dans l'Antiquité, elle a été conçue, et pourquoi, pour résoudre quel problèmes, et finalement, ce qui la rend toujours actuelle. La géométrie ? Qu'on cesse d'en faire un abstraction, alors qu'il n'y a pas plus concret. Etc..

Au fait, savais-tu que Boby Lapointe, ce merveilleux fantaisiste, était aussi un inventeur (l'embrayage automatique), et un sacré mathématicien ?

Flocon a dit…

Pour ce qui est de la géométrie, à part calculer les surfaces d'un appartement, je n'en ai jamais perçu le moindre intérêt si ce n'est que les amateurs s'y livrent aux joies de la pure abstraction.

C'est dire mon niveau...

Je crois me souvenir du terme "scalaire" avec des flèches au-dessus de je ne sais plus quoi... Jamais rien compris là non plus.

Ce qui me faisait davantage enrager encore que de ne rien comprendre à ce qu'on me disait, c'était d'être absolument exclu d'un univers où ceux que je jugeais "objectivement" être de gros bourrins (il y avait des filles aussi) semblaient être parfaitement à l'aise et se jouer de ce qui me paraissaient être d'insurmontables obstacles à mon intellect.

Il fallait donc que je me rende à l'évidence: j'étais un gros nul! Heureusement nous avons (certains en tout cas) des ressources psychologiques qui nous permettent de nous protéger d'une auto dévalorisation induite.

J'ai retrouvé les mêmes problèmes il y a 15 ans quand je suis retourné passer un DESS gestion d'entreprise. Statistiques et probabilités au programme.

J'avais 30 ans de plus et bien décidé à bien être attentif dès le premier cours.

Décidément le dieu des mathématiques, s'il existe, ne m'aime pas. Nos sommes tombés (et nous étions, nous les littéraires, regroupés dans une section à part) sur un type qui avait de gros, gros problèmes en tous genres.

Notamment pédagogiques, ce qui était le sujet du billet...

Comment parvenir à bousiller l'enseignement d'une matière, il y en a qui décidément en ont fait le grand œuvre de leur vie!

Bon, je vais voir ce qu'est le système vigésimal (ça doit être une base comptable sur 20 non? Comme il y avait la base sur 12 chez les Babyloniens je crois?