dimanche 9 mai 2010

An American tragedy


Je retrouve un vieil article du WaPo d'il y a 3 ans. 

“The “Desert Louvre,” as the French press has dubbed the deal, is part of a revolutionary initiative by France to expand its global influence through its vast cultural heritage and holdings — the one realm where it remains a dominant world power — in the face of its shrinking diplomatic and economic clout.”

Ca les démange toujours ce besoin d’insister sur la perte d’influence de la France, sa position économique affaiblie.

Si l’Italie était engagée dans un marché de même nature avec Abu Dhabi, Dubaï ou un quelconque autre pays, serait-il nécessaire de relever sa supposée perte d’influence diplomatique ou sa place moyenne dans le peloton des puissances économiques? Évidemment non mais comme il n’est pas possible de passer sous silence la position historiquement dominante de la France en matière d’art et de culture (mais l’Italie vaut bien la France au point de vue des beaux arts), il faut relativiser et amoindrir. Pour ce qui concerne la prétendue perte d’influence diplomatique de la France, on a vu ce qu’il en était avec l’Irak à l'époque.

Alors pourquoi une fois encore un journal américain présente-t-il ce genre d'information sous cet angle? S’il y a tant de clichés américains sur la France, c’est que celle-ci représente tout ce qu’une certaine partie des média et de la mentalité américaine se vante de n’être pas: éduquée, cultivée, high brow, intellectuelle. Cette absence d’histoire et donc de patrimoine culturel qui devrait l’accompagner est comme un rappel permanent d’une insupportable incomplétude dans l’identité même du pays. C’est là peut-être le malheur inavoué de l’Amérique, un destin exceptionnel auquel l’enracinement historique fait défaut. Et pourtant il faut bien vivre…

Alors cette mauvaise conscience (comme disait Susan Sontag de la France par rapport aux US), ce refoulé ne peuvent s’évacuer que par le biais d’une démonisation du contre modèle même, d’un effort permanent de ridiculisation et de mise à distance de ce reproche vivant qu’une certaine Amérique voit en la France et les Français. Il n’est qu’un moyen pour surmonter un lancinant complexe d’infériorité identitaire, c’est de faire corps de façon quasi pathologique aux emblèmes du groupe: l’hymne et le drapeau. Le drapeau on le voit partout, partout, partout… c’est obsessionnel.

Les Français n’en peuvent mais, tel a été le cours de l’Histoire. Et Abu Dhabi ne fait en l’occurrence que reproduire ce que les Américains eux-mêmes ont fait depuis la fin du XIX jusqu’à nos jours: acheter des chefs-d’œuvre de l’art européen pour remplir des musées créés de toute pièce afin de “légitimer” leur existence aux yeux des autres nations par une artificielle reconstitution d’un passé qui leur fera toujours défaut. 

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