mardi 4 novembre 2008

Aux armes et caetera





Il y a quelques semaines la Marseillaise a été sifflée lors de la rencontre France-Tunisie. C'était couru. Après le Maroc et l'Algérie, les centaines ou milliers de Français d'origine tunisienne de deuxième voire troisième génération se devaient de faire aussi bien...

On peut ne pas être choqué de "l'outrage à l'hymne national" ou même y être indifférent. Ce qui devrait inquiéter c'est que ce sont des Français qui ont hué leur propre hymne. Traduction: ils sont dans la détestation de leur pays de naissance qu'ils ne reconnaissent pas comme tel mais se considèrent fondamentalement Tunisiens (ou Marocains ou Algériens).

Bonjour l'intégration. Faudrait peut-être y mettre aussi du sien.

Et pourquoi jouer les hymnes nationaux au début des matchs de foot, de rugby ou que sais-je? Et pourquoi pas la levée du drapeau et la revue des troupes? Les règlements internationaux voudraient-ils exciter les sentiments nationalistes des masses pour chauffer l'ambiance?

Cela dit, les paroles de la Marseillaise sont vraiment à siffler à présent. D'ailleurs les paroles des hymnes nationaux du monde entier ne sont guère à recommander comme anthologie poétique...

En 1992, aux JO d'hiver à Albertville, pour la cérémonie nocturne d'ouverture, les gentils organisateurs avaient eu la brillante idée de mettre une gamine de 14 ans à peine sur une piston élévateur pendant qu'elle chantait a capella

mugir ces féroces soldats,
égorger nos filles et nos compagnes
qu'un sang impur abreuve nos sillons etc.

Bonjour le message de bienvenue aux visiteurs étrangers...

Le mieux ne serait-il pas de ne pas chanter la Marseillaise s'il faut vraiment la jouer?
Ou mieux, diffuser la version de Gainsbourg, la moins ringarde de nos jours.

13 commentaires:

Anonyme a dit…

Perso, je pense juste que les hymnes nationaux sont des conneries (Dieu sauve la reine de Séféro ce soldat etc) et que les jouer avant des trucs sportifs a été imaginé par des imbéciles pour des imbéciles siffleurs ou non.

J'espère qu'Obama va faire interdire les hymnes aux jeux olympiques et faire enfermer les patriotes. Il est plus que temps...

Etchdi

Flocon a dit…

Ouh là, on a affaire à l'anar pur et dur là.

Tu ne serais pas un des premiers abonnés à Siné-Hebdo? ;-)

Quant à Obama, je ne suis pas sûr qu'il te suive dans ta radicalité. En tout cas pas dans un premier temps.

Anonyme a dit…

Non, je n'aime pas tellement Siné non plus (mais j'aime encore moins son ennemi Val).
C'est la journée des "j'aime pas". Ca fait du bien de temps à autre.

Je sais bien qu'Obama ne va pas (et ne veut sans doute pas non plus) supprimer les godemichés des patriotes. D'ailleurs il ne va sans doute pas pouvoir faire grand chose, vu les circonstances.
Partir d'Irak dans quelque temps peut-être, ou relancer une machine à profits qui va encore se casser la figure peu après. Enfin, ça ne me touche pas trop, je n'ai pas de sous.

Autant de choses et beaucoup d'autres que je ne peux pas aller raconter chez SF, vu l'euphorie ambiante (sauf pour Greg, qui pisse du vinaigre)...

ZapPow a dit…

Ce qui devrait inquièter c'est que ce sont des Français qui ont hué leur propre hymne

C'est ce que je me tue à dire lorsqu'on discute de ces "événements". Mais je suis sans arrêt confronté à des bons Français (qui pour certains se caractérisent comme "de souche") qui parle de ces autres Français, ceux qui ont sifflé, en disant "ces gens-là", "ils n'ont qu'à rentrer chez eux", "ils sont inassimilables", etc., et quand je leur dit que tant qu'ils considèreront ces autres Français comme des étrangers, ces derniers n'auront aucune raison d'aimer leur pays, je suis un raciste anti-blanc, ou anti-Français, ou un dhimmi, et même, paraît-il, un trotskiste !

Flocon a dit…

Etchdi,

A propos d'Obama et de la poursuite de l'engagement militaire, j'ai écrit un billet en juillet dernier (le dernier en anglais d'ailleurs)

http://tinyurl.com/6jtnf7

qui va dans ton sens.

Flocon a dit…

zappow,

Cette question de l'intégration des maghébins d'origine me fait penser à l'oeuf et la poule.

Ne s'intègrent-ils pas (un certain nombre) parce que la société les discrime ou la société les discrimine t-elle parce qu'ils ne veulent pas s'intégrer pleinement?

N'y a t-il pas utilisation abusive de l'histoire coloniale pour prospérer impunément dans le rejet de sa patrie?

La repentance exigée par Bouteflika n'est-elle pas de nature à aider les jeunes issus de la 2è voire 3è génération d'Algériens dans le sentiment qu'ils ne doivent rien à la France mais qu'au contraire elle leur doit tout?

La communauté asiatique en France n'a aucunement ce genre de rapport à leur patrie, mais il est vrai qu'elle ne semble guère intéressée par la notion même d'intégration.

Enfin, je ne sais pas...

Si ce n'est pas indiscret, ton pseudo fait-il référence à quelque chose?

Anonyme a dit…

Salut Flocon,

Je me souvenais de ton billet précédent.
Je partage (aussi) assez ta réponse à Zappow (salut Zappow) sur la question de l'oeuf et de la poule.

Les Asiatiques ont une approche différente, dans la mesure où ils savent qu'une intégration dans un autre pays (et ils ont commencé il y a longtemps) prend du temps et que pour qu'un "de souche" t'accepte il faut faire preuve d'un plus grand talent que lui, le tout sans cesser de sourire pour qu'il ne soit pas jaloux.

En gros, il *n'exigent* pas leur intégration...

Etchdi

ZapPow a dit…

Mon pseudo fait référence à un groupe de reggae des années 70, Zap Pow.

ZapPow a dit…

@ Flocon

Pour répondre à ton commentaire sur l'œuf et la poule, je crois qu'on a affaire aux deux : il y a un groupe qu'on ne peut intégrer parce qu'il n'a jamais voulu l'être, par volonté ou incapacité, et un groupe qui ne demande pas mieux, mais à qui on met des bâtons dans les roues.

Dans chaque discussion à ce sujet, on me balance l'argument de l'inassimilabilité des descendants d'immigrés d'Afrique du Nord et sub-saharienne. À quoi je réponds avec les nombreux exemples, flagrants, de Français issus de cette immigration qui sont parfaitement intégrés, même s'ils sont musulmans, et dont certains apportent une richesse culturelle appréciable au pays. Mais je dois me rendre à l'évidence : mes interlocuteurs ne veulent pas les voir.

Je suis d'accord avec ce que tu dis à propos de l'histoire coloniale. Elle sert bien trop souvent d'alibi à des récriminations, d'excuse à des échecs, et, en ce qui me concerne, la repentance doit s'arrêter à la reconnaissance des crimes. L'esclavage, par exemple, a été reconnu comme crime, la France a reconnu sa participation (les Africains, les Arabes ont encore à reconnaître la leur), c'est consigné dans les livres d'Histoire, un jour a été désigné pour commémorer*… Pas besoin de plus que ça… C'est du passé, et ne l'oublions pas, il y a eu des Français pour lutter contre ces crimes. Il n'y a pas lieu de poursuivre les fils pour les péchés des pères jusqu'à la septième génération (et au-delà, en réalité).

Ceux qui veulent aller plus loin et demandent réparation me sidèrent. Je suis résolument contre, pour moi ça n'a pas de sens. Admettre ses torts est bien assez pour soulager les acrimonies, et repartir sur de nouvelles bases. Encore faut-il qu'on veuille repartir, et qu'on ait une idée d'où on veut aller.

* La date prête à polémique. Je suppose que nous garderons en plus, aux Antilles, nos journées de commémoration traditionnelles, le 22 mai à la Martinique, jour anniversaire du soulèvement qui a forcé le gouverneur à signer l'abolition de l'esclavage (après le vote de l'abolition en France, mais avant réception du décret de loi aux Antilles), le 27 ou le 29 mai, je ne me rappelle plus, pour la Guadeloupe.

Flocon a dit…

zappow,

Merci pour ce commentaire élaboré

On est bien d'accord donc.

Pour l'oeuf et la poule c'est une espèce d'aporie: on peut aussi bien démontrer une thèse que son contraire et on n'aboutit à rien évidemment.

Pour se focaliser uniquement sur les Maghrébins, ce ne sont pas les immigrants d'il y a 30 ans qui font problème mais bien leurs descendants. Nés Français, ils n'ont connu qu'un climat de culpabilisation de la part d'une certaine intelligentsia française qui justifie à leurs yeux toute forme d'exigence revendicatrice.

C'est un peu comme les féministes les plus radicales ou certaines lesbiennes pour lesquelles l'homme est un irréductible ennemi naturel auquel rien ne devra être épargné.

Admettre ses torts est bien assez pour soulager les acrimonies, et repartir sur de nouvelles bases. Encore faut-il qu'on veuille repartir, et qu'on ait une idée d'où on veut aller.

Il me semble que cela peut s'appliquer aussi aux féministes;

Je crois me souvenir que Frantz Fanon ("les damnés de la terre") n'exigeait que l'égalité et la reconnaissance des tords et basta. Mais pas d'entretenir une plaie purulente ad vitam et aeternam.

ZapPow a dit…

Fanon a raison, mille fois raison. Malheureusement pour nous, les Fanon, et les jaurès, Gandhi, Mandela sont rares.

Et oui, ça peut s'appliquer au féminisme, et à tous les mouvements revendicatifs.

ZapPow a dit…

Un article fort intéressant dans le New York Times d'aujourd'hui, qui enseigne quelque chose sur les sentiments des Noirs en France :

http://www.nytimes.com/2008/06/17/arts/17abroad.html?_r=1&scp=4&sq=france%20obama%20africa&st=cse&oref=slogin

(TinyURL refuse de traiter cette adresse).

Flocon a dit…

Meanwhile, this past weekend, 60 cars were burned and some 50 young people scuffled with police and firemen, injuring several of them, in a poor minority suburb of Vitry-le-François, in the Marne region of northeast France.

Pas entendu parlé de ça. Il est bien possible que les médias n'en aient pas rendu compte.

Mais est-ce vraiment lié à la thématique de la négritude et de l'exclusion? Etait-ce des noirs ou un ensemble de jeunes noirs, arabes, français ou portugais?

Tout est lié sans doute mais il me paraît que ces événements peuvent relever de la simple délinquance juvénile.

De même les émeutes de 2005 n'avaient pas d'origines particulièrement raciales ou religieuses. Mais sans doute l'expression d'une détestation de l'Etat, de l'autorité etc. Plus l'effet de groupe.

Je suis tout à fait d'accord avec le dernier paragraphe.