Quand il remonte la colline en traînant sa luge, Till Eulenspiegel savoure d'avance le plaisir que lui procurera la descente; mais quand il la descend il s'attriste de la peine qu'il aura en remontant de nouveau la colline avec sa luge pour le plaisir renouvelé de la descente à venir et ainsi de suite sans fin.
Till Eulenspiegel n'est jamais en accord avec son temps : il s'attriste quand il devrait être gai et se réjouit quand il devrait se lamenter. Il ne vit pas sa vie pleinement dans l'instant mais toujours par anticipation : il ne vit pas sa vie!
Tous, en général, nous avons hâte de quitter l'hiver pour retrouver des jours lumineux et des températures plus agréables.
Mais être pressé de sortir de cette période n'est-ce pas comme être pressé d'être plus âgé de plusieurs mois? N'est-ce pas consentir implicitement à ne pas pleinement vivre des années cumulées d'hivers de nos vies dans l'attente d'un futur plus agréable mais toujours fugace et incertain?
Vivons donc pleinement ces froides et sombres journées d'hiver, elles font partie du temps qui nous est donné à vivre, ne nous précipitons pas sottement vers le dernier jour de notre vie.
Carpe diem!
15 commentaires:
Je souscris quarante douze mille fois à ce que vous écrivez dans ce billet. Vous voyez je suis une bénie oui-oui!
Trêve de plaisanterie! Il y a des gens,des âges où c'est un art d'exhiber ses insatisfactions! Il faut peut-être avoir un peu plus vécu (c'est-à-dire avoir vécu quelques épreuves) pour savoir son bonheur d'être là, dans la vie, avec un temps qui nous remplit et nous construit, mal peut-être, pas comme on voudrait, mais là, résolument.
Vivre par procuration ou par anticipation, ce n'est pas vivre, tout court.
Je suis d'accord avec ceux qui sont d'accord avec moi! :-D
"Je souscris quarante douze mille fois"
Très étonnant que vous écriviez ceci qui est pile-poil le thème du prochain billet. Auriez-vous donc aussi des pouvoirs paranormaux?
"Il faut peut-être avoir un peu plus vécu (c'est-à-dire avoir vécu quelques épreuves) pour savoir son bonheur d'être là, dans la vie, avec un temps qui nous remplit et nous construit, mal peut-être, pas comme on voudrait, mais là, résolument."
C'est ce que l'on a toujours appelé la sagesse venant avec l'âge je crois et qui fait donc qu'il n'est pas possible d'appréhender le monde et la vie qui s'écoule lentement quand on a 20 ans, 30 ans, 40 ans et plus même comme on peut le faire après 50 ans. C'est dans l'ordre des choses et c'est bien ainsi sans doute. Il ne faut pas être vieux avant l'âge.
Avoir 20 ans et savoir ce que je sais!
Je pense aussi à tous ces salariés qui n'attendent que la retraite pour vivre. J'ai beau dire que la vie c'est aujourd'hui, à cette heure, maintenant et pas demain et encore moins dans 5 ou 10 ans, rien n'y fait, c'est une aliénation collective qui est en place.
Le salariat, esclavage moderne qui dépossède les gens de leur propre vie. Mais combien seraient ceux capables d'autonomie? Il y a plusieurs fables du bon Jean sur ce thème je crois.
Désolé pour le Comme la vie est lente, que je garde cependant sous le coude. J'avais l'intro en tête il y a deux jours et elle s'est évaporée dans la nuit. Je garde donc de quoi écrire sur la table de nuit!
Il y a quelques maladresses dans le billet mais bon, c'est comme ça...
Je dis toujours que la quotidien structure... et donne l'appétit. Le travail fait partie de ce quotidien: la socialisation-et d'autres qualités- qu'il implique est stimulante.
Il y a longtemps j'avais pris une année sabbatique pour faire "ce que j'avais envie ", croyant bêtement que ce que je faisais était terne, fade, contraignant. Qu'arriva-t-il? Je ne fis RIEN et sortis de cette expérience assez laminée! Je m'étais sentie coupée de tout, d'une réalité qui m'était au fond indispensable et d'un temps où je me sentais bousculée!
Effectivement Flocon, on vous sent plus gêné aux entournures quand il s'agit d'avoir une écriture plus ...narrative avec quelques accents intimistes (le "nous" derrière lequel se cahce un "je" qui n'ose pas trop se montrer... le "nous" de
modestie, me direz-vous?)
Hegel écrit du travail qu'il est anthropogène.
Peut-être n'aviez-vous pas préparé cette année sabbatique et vous êtes-vous retrouvée comme les retraités qui ont attendu des 30 et 40 ans le jour de leur "libération" sans le préparer.
Du jour au lendemain c'est le vide et ils errent autour de leurs anciennes usines, au café avec les anciens collègues, dans le désœuvrement complet faute de savoir prendre leur vie en main sans que ce soit l'employeur qui le fasse à leurs places.
Attention merbel, je ne dis pas que vous éclusiez les rades du quartier de la Madeleine avec les chômeurs et retraités de la zone... ;-)
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J'ai eu mon époque narrative sur ce blog à l'occasion, sans trop en abuser non plus je crois. Mais effectivement, je n'ai pas ouvert le blog pour y déployer mon ego.
(Il reste cependant quelques épisodes d'une série de 25 très perso)
Si je le faisais, question longueur, le Mahabharata et les 5 classiques chinois seraient de la roupie de sansonnet par comparaison...
- La fin de la première phrase par exemple n'est pas bien fichue.
- La phrase sur les dépressions et les suicides est superflue, je vais sans doute la virer.
- Les années cumulées d'hiver n'est pas un modèle du genre non plus.
Vivons donc pleinement ces froides et sombres journées d'hiver
Je ferai mon mieux, mais avec 16°C et le ciel tout bleu, ce serai difficile.
Et le statue, c'est qui? Horace?
Oof... nevermind... c'est évidement Till Eulenspiegel
"16°C et le ciel tout bleu"
You lucky one! Ain't life easier for some? grrrr...
"Et le statue, c'est qui? Horace?"
C'est celle de Till Eulenspiegel.
You're not fully awakened Anijo since it must be 7 a.m in New-Mexico... ☺
It was 6 a.m ! A good excuse anyway.
Et ce Till. Qu'est-ce qu'il a à voir carpe diem?
"Et ce Till. Qu'est-ce qu'il a à voir carpe diem?"
6:30 a.m
Still a bit too early to fully grasp the post... ;-)
Carpe diem oui, et pourtant .. on m'a mis à la retraite d'office car je coutais trop cher .. ils vont me filer une très bonne prime et ne suis donc pas à plaindre ! J'étais un simle employé , pas très heureux en fait, sous le joug de petits chefs mesquins. Ils m'ont fait à peu près tout : conseils de discipline et j'en passe ... non, je n'étais pas heureux, vraiment pas.
Anonyme mélo ... vraiment mélo !
Anonyme mélomane,
Ce n'est certes pas moi qui vous dirai que la vie est belle et que le bonheur est notre état naturel.
Pourquoi ne faites-vous vôtre cette belle sentence de La Rochefoucault :
"On n'est jamais si malheureux qu'on croit, ni si heureux qu'on avait espéré."
Toute votre vie ne se résumait certainement pas à votre travail (aussi anthropogène qu'il soit...) et même chacune des journées du salarié lui propose maintes occasions de jouir pleinement de ce qu'il est.
Une pause café dans un troquet, remonter les escaliers du métro pour se retrouver à l'air libre, simplement marcher dans la rue, regardant autour de soi en se félicitant de n'être pas aveugle, handicapé...
A chaque instant avoir bien à l'esprit que le temps passe et que ce moment apparemment vide de sens n'est tel que parce que l'on ne sait pas lui donner un sens précisément.
Être heureux d'avoir su qu'existait telle allemande d'une partita pour piano de J.S Bach et d'avoir eu le bonheur de l'écouter et d'encore se la fredonner mentalement.
Se souvenir du plaisir qu'a pu nous offrir tel ou tel livre, se remémorer des plaisirs passés... (cf. les Stoïciens)
A chaque instant se sentir vivre, respirer, bouger même si l'on traverse une épreuve de santé particulièrement sérieuse (tant que la souffrance physique n'y met pas du sien).
"non, je n'étais pas heureux, vraiment pas."
Je crois bien que tous nous pouvons dire la même chose d'une période donnée et comprendre que nous étions heureux pourtant mais que nous l'ignorions. Nous nous méprenions sur notre rapport à nous-mêmes.
Carpe diem : il faut prendre de chaque journée ce qu'elle nous offre, ne serait-ce que le bonheur de n'être pas malheureux à tel moment particulier.
De toute façon chacun vit sa vie tel qu'il devait nécessairement la vivre, c'était le sujet du billet sur les Occasions perdues.
"On n'est jamais si malheureux qu'on croit, ni si heureux qu'on avait espéré."
Flocon, si tu as vu le conference de Lawrence Krauss que j'ai posté, tu as entendu la citation de Kurt Vonnegut qu'il a lu.
Vonnegut a donné une "graduation speech" et disait, "Things are only going to get worse and never, ever get better." (Approximately.)
Ned,
As I've written before I'm now earing impaired. It doesn't mean that I'm deaf, quite the opposite, but, if the comparison holds true, it's like being short-sighted with sounds.
So imagine watching a movie without glasses when you're short-sighted... Tu ne restes pas longtemps dans la salle.
Even when it's in French I have difficulties to understand what is said alors en anglais ou en américain... ô-Ô
Add to this tinnitus...
I didn't listen to the Hitchens/Blair debate but had to rely on the transcript.
To make a long story short, I haven't listened to the Lawrence Krauss video for the aforementioned reason.
As you know Kurt Vonnegut took shelter in the basement of a slaughterhouse when he was in Dresden during the British bombing of the city.
No wonder then that he wrote the sentence you quote.
Ce qui pose d'intéressantes questions relativement au finalisme (curieusement il n'y a pas de page Wiki en anglais sur le sujet, uniquement en français).
Par exemple : à partir de quel moment les choses empirent-elles? Y a -t-il eu un moment où "les choses" étaient meilleures qu'elles ne le sont à présent.
Si les choses se dégradent en permanence, il a bien fallu pourtant que cette dynamique ait un moment originel (l'âge d'or?) à partir duquel la dégradation sans fin se soit mise en route.
Cela dit je suis plutôt d'accord avec Vonnegut.
Flocon, Krauss ends his lecture on explaining the expansion of the universe meaning that in the future some civilization will only see our Galaxy, all the rest having moved too far away.
He says "They will be alone, ignorant, and dominant. We in the States are used to that."
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