mardi 19 avril 2011

Les bienfaits du colonialisme


Il y avait peut-être une vingtaine de millions d'Africains quand les Arabe envahirent le nord et islamisèrent les populations indigènes à partir du VIIè siècle, imposant leur religion totalement étrangère aux cultures et à l'histoire des peuples asservis.

Douze siècles plus tard une partie non négligeables de l'Afrique noire est musulmane et donc en opposition larvée avec les populations chrétiennes. Ainsi l'élection dimanche dernier de Goodluck Jonathan, chrétien, à la présidence du Nigéria, pays le plus peuplé d'Afrique avec 152 millions d'habitants, est-elle violemment contestée par la partie musulmane du pays qui refuse bien évidemment qu'un Chrétien les représente.

Islam contre Christianisme en Afrique noire! Mais qu'est-ce que ces deux religions ont-elles à faire dans ce continent si ce n'est qu'elles ont été imposées à des populations qui avaient leurs propres croyances endogènes? Comme si les conflits tribaux et ethniques ne suffisaient pas, les colonisateurs ont surimposé une troisième strate génératrice de violences aux deux premières sources de massacres entre Africains. Sans compter l'éradication des croyances et structures socioculturelles des Noirs.

Frantz Fanon dans son Peau noire, masques blancs, expose comment les colonisés assimilent les valeurs des Blanc, supposées supérieures aux leurs propres puisque le colonisateur représente un idéal auquel il est nécessaire de s'identifier pour obtenir son approbation et sa reconnaissance. Vaine illusion qui conduit le colonisé à se faire volontairement encore plus dépendant du regard et du pouvoir du colonisateur car il a démontré à celui-ci combien son œuvre colonisatrice est réussie puisqu'elle est parvenue à subjuguer non seulement les corps mais aussi les esprits de ses conquêtes.

Les Anglais qui ont dirigé le Kenya à partir de 1895 ont modelé cette colonie selon leurs modèles politique et judiciaire. La thèse de Fanon trouve ici une triste confirmation quand on considère les juges Noirs porter les perruques de la petite aristocratie anglaise du XVIII ème siècle. Pitoyable singerie qui amène ces gens à tenir à leurs oripeaux étrangers avec autant d'obstination qu'un magistrat français qui serait prêt à vendre père et mère pour ne pas se voir retirer son hermine et sa belle robe rouge.


Autre exemple désolant de la colonisation des esprits, le Christianisme qui a été inoculé aux Noirs par les Français, les Portugais, les Espagnols et les Anglais. Conséquences de l'esclavagisme industriel au XIX ème siècle il y a aux États-Unis des milliers de pasteurs évangélistes qui ont la foi des convertis et prêchent à leurs semblables descendants des esclaves africains la vérité révélée que les Blancs leur ont imposée. 

Quelle tragédie que celle des Africains qui ont à ce point intégré les valeurs de leurs colonisateurs qu'ils s'en font à présent les plus ardents propagandistes au mépris de l'histoire de leur peuple et de leurs cultures originelles.

La photo ci-dessus (1945) montre combien les Blancs -anglo-saxons en l’occurrence- ont réussi leur œuvre colonisatrice avec ces six Noirs premiers diplômés du collège chrétien de Caroline avec une femme blanche se tenant à droite, fière de la réussite de ses élèves.

Le colonialisme n'est plus triomphant comme il l'était aux siècles précédents. Peu importe, les valeurs qu'il voulait imposer se sont bel et bien installées dans les esprits avec l'assentiment assumé de gens comme les juges Kenyans ou les pasteurs évangélistes noirs des États-Unis.

Frantz Fanon avait raison!

6 commentaires:

Anonyme a dit…

France and the U.S. both have a well-documented history of being colonialists: the U.S. with Manifest Destiny and France with Mission Civilisatrice.

Flocon a dit…

Don't forget the Spaniards who completely eradicated all civilisations out of South America.
Talk of genocide.

But it was in the name of Christus Rex so it can't have been so bad...

ZapPow a dit…

Ben oui, Fanon avait raison, et Césaire aussi, dans son "Discours sur le colonialisme".

Te rappelles-tu cette citation : "L'esclave prend le fouet des mains de son maître, et se fustige jusqu'à devenir son propre maître" ?

Le fait que les colonisés aient ce point intégré discours et le reste des colonisateurs m'y fait penser (je suis incapable de me souvenir qui en est l'auteur, et soudainement je me demande si ce ne serait pas ce cher Halldor Laxxness, ce serait assez dans son style).

Flocon a dit…

J'ai lu les deux textes principaux de Fanon mais rien de Césaire. Ta remarque me renvoie sur Wiki où se trouve un article bien sûr et des extraits du texte. C'est déjà ça en attendant de me procurer le livre.

La citation pourait être de Hegel ou Nieztsche mais je ne suis pas sûr de bien la comprendre.

Signifie-t-elle que l'esclave s'approprie (fait sien) le fouet du maître (c'est à dire ses valeurs) et qu'il s'inflige à lui-même les tourments que lui appliquait le Maître, prenant ainsi la place de celui-ci qui, d'une certaine façon, est parvenu à faire intérioriser à l'esclave que lui le maître n'est plus responsable de l'état d'esclave de la victime, celle-ci s'étant persuadé de sa pseudo liberté parce que ce n'est plus le maître qui cingle mais lui-même?

L'esclave est toujours esclave avec l'illusion qu'il ne l'est plus parce que les coups ne sont plus portés par le maître mais par lui-même. Mais ce sont les mêmes coups cependant et les même valeurs de soumission de l'esclave au maître.

Il y a une lecture psychologique à faire ici sur le retournement inconscient du soi en son prétendu contraire mais qui ne fait que perpétuer une situation ancienne, exposée sous une forme inversée mais qui aboutit à ce que rien ne change in fine.

Enfin, c'est ainsi que je comprends la citation.

ZapPow a dit…

Moi non plus, je ne suis pas sûr de bien comprendre la citation. C'est le genre de phrase qui donne à réfléchir, et pour l'heure, j'en fais la même interprétation que toi.

Flocon a dit…

Il me semble que tu as déjà cité cette phrase mais je n'en suis vraiment pas sûr.

Il y a des phrases qui donnent à penser effectivement mais parfois elles feraient gagner du temps au lecteur et le garderaient de se perdre dans des explications qui les rendent plus incompréhensibles encore...

Ma laborieuse interprétation n'aurait pas eu lieu d'être si l'auteur avait clairement dit ce qu'il avait à dire...

Peut-être as-tu cité de mémoire et y a t-il une petite distorsion d'avec l'original? Le contexte permettrait peut-être de mieux comprendre la phrase.

Google devrait pouvoir répondre mais il ne le peut...

Seul moyen d'y voir plus clair : Je te suggère de relire tout Laxness pour repérer et récupérer la citation... ;-)